jeudi 28 octobre 2010

Tea Party et jeunes Français : même combat

La révolte de la jeunesse française est depuis deux semaines quotidiennement commentée dans la presse internationale. Certains la comprennent voire l'admirent, d'autres y voient la manifestation du statu quo à la française, la révélation d'une jeunesse manipulée, irresponsable, cossarde, pathétique et ridicule. Parmi les centaines de commentaires, articles, édito, blogs sur ce sujet, la comparaison faite par Mark Lilla, "historien des idées" à l'université Columbia de New York, entre les manifs des jeunes Français et le mouvement américain conservateur des Tea Party n’est pas passée inaperçue outre-Altantique.

Mark Lilla, qui était à Lyon - l'un des épicentres de la gronde - au moment des manifs, écrivait sur son blog de la New York Review of Books : "Dans un pays obsédé par la perte de la mémoire nationale, les grèves annuelles sont, avec le Tour de France, l'un des rituels publics qui rappellent aux Français qu'ils sont Français - pas des 'Européens' mais bien des Français".

Ces derniers, explique-t-il, en ont "assez du chômage, assez de l'austérité, assez de la paralysie politique, assez des privilèges pour les riches, assez de la corruption. C'est un amas incohérent et parfois contradictoire d'inquiétudes, et mis ensemble, ils n'arrivent pas à le transformer en un plan d'action clair. Mais peu importe. Comme les manifestations des Tea Party aux Etats-Unis, ils sont l'équivalent politique des actes de langage, provoqués par la contraction économique et la perte de confiance dans la classe politique."

A son sens les deux mouvements "se sentent marginalisés, ne font pas confiance en leurs responsables politiques, souhaitent que les choses changent, et veulent que rien ne change. Plus que tout, ils veulent s’exprimer, et ce qui sort de leurs lèvres est façonné par leur identité nationale. "Don’t tread on me!" Et "On va gagner!" Signifient au final exactement la même chose: nous serons entendus. La question de savoir s’ils ont quelque chose à dire est un autre problème."

Outre un florilège de commentaires bien sentis à la suite de son post -auxquels l'auteur a répondu, l'essayiste américain et sa théorie se sont vus démontés dans un journal européen, la Süddeutsche Zeitung. Pour le quotidien allemand, c’est tout simplement du n’importe quoi ou plus exactement l’arrogance d’un penseur qui mélange tout. Car si les Tea party est un mouvement qui souhaite repousser l’influence de l’Etat, il est également xénophobe et homophobe.

Tandis que la résistance des jeunes Français aux réformes des retraites, elle, témoigne du malaise d’une jeunesse confrontée à la précarité qui, entrant de plus en plus tard sur un marché du travail hostile est, à la perspective de cotiser 41,5 années, révoltée.

La Süddeutsche porte l'estocade : "Son point de vue ressemble à celui d’un étranger décadent qui, attablé dans un bistro lyonnais un verre plein de bon Côtes du Rhône à la main, observe avec arrogance la foule qui manifeste comme s’il s’agissait d’un défilé du carnaval ou mieux, de celui d’indigènes". "D’une telle hauteur, le manifestant français combatif peut aisément se confondre avec un manifestant primitif du Tea Party et vice versa".

Et le journaliste allemand de conclure : comparer ces deux mouvements c’est tout simplement faire preuve d' une ignorance crasse de la réalité de la jeunesse française.

http://www.presseurop.eu/fr/content/billet-de-blog/372381-tea-party-et-jeunes-francais-meme-combat

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